dimanche 18 décembre 2016

Du beau dans les ténèbres
 La sirène des pompiers, aujourd'hui encore ils l'ont ramené, il va dormir chez lui cette nuit, c'est bien , il sera au chaud. Cet homme que tout le monde appréciait, créatif, attentif, dans une forme physique éblouissante est devenu en peu de temps un être qui semble vide, on ne sait quelle tempête a balayé sa tête. J'angoisse devant cette vieillesse pourtant il affiche un visage serein, on échange quelques mots parfois le matin, il vient écouter la musique quand je joue, il parle d'enfants, de l'enfant qu'il doit aller chercher, de l'enfant qu'il doit emmener sous l'arbre là haut sur la colline, sur la colline d'où on embrasse le paysage, sur la colline où on touche les étoiles.
Tout ça , c'est imaginaire, des enfants, je ne lui en connait qu'un, c'est moi, je suis là, pas là bas...
Contraires:
Melle Prune, maîtresse de profession, comme on disait à l'époque, se présentait devant ses élèves les cheveux tirés, le chignon serré, les ongles coupés, elle portait une longue jupe grise, un pull noir bordé d'un col claudine impeccablement amidonné. Elle parlait d'un ton monocorde, les lèvres pincées. Quand les enfants entendaient taper les bottines dans le couloir , ils se levaient , se tenaient droit à un pas de leur bureau. Un coup de règle sur le plancher et le silence planait.On respectait Melle Prune.Jusqu'au jour où un parent d'élève , tout aussi respectable se mit à fréquenter les maisons closes pour des raisons qui lui étaient propres. Propre, la réputation de belle Prune le fut moins quand Mr Vincent la découvrit fardée, les cheveux rouges tombant sur les seins dénudés, une écharpe de plumes sur les épaules et un long fume cigare entre des lèvres pulpeuses. Elle arpentait la rue ST Pancrace en jupe de cuir écarlate.
Le lundi matin, Mr Vincent enleva son fils de l'école André, pas en représailles contre Melle Prune mais pour garder secrète la relation qu' ils entretenaient le samedi dans un hôtel de la rue St Pancrace.


Mr Balanite colle des affiches  dans le quartier, de jolies affiches décorées de photos d'animaux, il organise des conférences sur la disparition des espèces, il recueille les chiens abandonnés, il a même construit une maison de retraite pour les chevaux. Vous l'aurez compris, Mr Balanite est un grand défenseur du monde animal, pour financer sa cause il distribue les calendriers de la S.P.A. Pourtant, vous ne le verrez pas à votre porte en ce début d'année, vous pourrez le voir en prison, on l'a surpris une nuit de pleine lune un fusil sur l'épaule. Mme Yvette , qui découvrit cette attitude incongrue le suivit et là, elle assista avec stupeur à l'assassinat de chats, au dépeçage de chats, à la mise en civet de chats. Le commissaire en charge de l'arrestation conclut l'affaire en ces mots:
"Ou bien Mr Balatine n'aime pas les chats , ou bien sa femme aime les chats".


Les incipits :

Chaque fois que Christiane ouvre la bouche, c’est pour vous parler de sous, de l’augmentation du prix de la baguette de pain, du montant mensuel de l’abonnement au journal, de la stagnation de la valeur de la viande pourtant elle est végétarienne Christiane. Je pense qu’ elle a été conçue avec une calculette dans la tête, au cours des repas on lui prépare des énoncés de problèmes…

Je ne comprends pas pourquoi les gens s’interrogent tous les jours sur le temps qu’il va faire. On ne peut rien changer alors sortez !
Mince, c’est inondé !

Quand je pense à Rachel, je me souviens du garçon avec lequel elle est partie un matin d’automne, c’était mon petit ami.

La question était précise, le commissaire de police voulait savoir à quelle heure j’avais fermé la cage des lapins le soir du 3 octobre 1968.

Il est trop petit pour moi ce tiroir à chaussettes, j’ en ai de toutes les couleurs et pas de déparaillées, pourtant je n’ai pas le souvenir d’être sortie avec une seule chaussette dans mes baskets.

La prochaine fois que j’entendrai claquer les voiles dans ma tête, je partirai, je m’abandonnerai au vent portant, je partirai…

Tout s’est passé comme prévu, elle est arrivée, toute belle du moins elle le croyait, elle s’est installée à table, a pris la parole, ne l’a plus quittée, elle nous a saoulé.

Avant ma naissance déjà, je me posais des questions sur la vie, c’est bien ? c’est nul ? Quel charivari ! et si je restais là au chaud ! j’ai eu pitié de ma mère, trainer un tel fardeau ! Je décidai d’essayer, on ne sait jamais…

 Viviane n’avait jamais eu de chance et pourtant en se levant ce matin -là, elle sentit que quelque chose allait se passer dans sa vie. En buvant son café, elle découvrit dans l’immeuble en face un nouveau voisin ou un chien, elle ne voit pas bien Viviane.



Je me souviens

Je ne me souviens pas de la date exacte, il y a si longtemps, j’étais encore loin de ce monde mais j’entends les grondements de Vulcain, j’ai dans la tête le râle de la nature, je tousse encore des odeurs de souffre qui se répandent sur la ville et cette fumée qui avance en rouleau depuis le bout de l’horizon. Je sens au fond de moi cette préparation de fin du monde, la nuit en plein jour puis la montagne qui s’ouvre sous la pression des démons, le silence pesant qui annonce l’explosion, le feu partout, de la terre au ciel, le feu qui dévale les pentes, avale les maisons, me rattrape, dévaste tout, me dévaste. Si vite, ça s’est passé si vite. Tous furent figés, étouffés, pétrifiés dans leur vie au travail, en promenade . C’était fini, c’était la fin du monde que je voyais depuis l’autre côté de la baie. S’en était fini de la vie, de l’agitation, des rêves, des danses, des fêtes.

Nous sommes rien. Des ruines, Pompéi n’est plus, elle est vaincue dans son apogée, la nature a gagné ; que va-t-on raconter plus tard ? Va-t-on oublier ? Va-t-on parler que de batailles, de président, d’économie, de pluie ou de beau temps ?
« anastrophe d’une mère »


La laine, ma fille tu fileras
Les doigts te piqueras
Le tissu de bure ma belle tu travailleras
Les idées vagabondes de ta tête tu sortiras
Comme les livres et autres fadaises de ta chambre tu ôteras
Utile, le mot tu apprendras
La laine mohair ou angora, dans les boutiques tu les admireras
Tes rêves de douceur, oublier il faut
Les vieux pulls tu déferas
De ces restes des nouveaux renaitront
Des économies tu dois
Fantaisie en ces temps n’est pas
Ta légèreté bien trop frivole semble
Beaucoup à apprendre, encore il te reste

Bonne apprenti ma fille tu seras !